mardi 6 mai 2008

froid comme deuxmains sous la neige







( ...)

L’homme grignote la pomme
fabrique l’antidote bleu
dans sa large poitrine
tournée vers le Nord
lavée de tout soupçon
clairement exposée au gel de l’aube

le visage frais

la peau lisse

dans la gorge le fruit reste visible

pique la peau

marque son profil

un putain de trognon aux pépins noirs

je passe

je nageais dans les eaux tréfondes

une main fantôme tenait un arc

immensément tendu

il réclamait la visibilité de mon corps

pour mieux briser le cadre

et déchirer la toile

niant le récit en point de croix

si j’avais pu cracher la teinture noire

poisseuse

avalé pendant le sacrifice

et me délivrer des liens,

de la jambe tronc

fuir les douze flèches, sinon plus…

mais, tout a été offrande

et le rituel muet

est devenu nourriture pour l’homme

et une déchirure insondable

pour mon corps au quotidien

j’étais le fruit pourri au sexe oublié

ouverture sans regard,

bras trop longs dos gros

ventre proéminent roulé sous la chemise

bouche absente soif permanente

large langue blanchie

mains noueuses poitrine rayée

jambes crayonnées de bleues

pieds meurtris et j’ai du porter ceci

comme une valise vide de sens tout le long de la marche !

celui-ci ou un autre me dis-je

puis sa carrure s’offre à mes yeux

et le relief prend place à l’endroit précis des objets

l’eau devient source claire et apaisée

je bois le café

son velours me caresse la gorge

lave ma langue colore sa joue


devant l’autel installé sur ma table

où se mêlent des fleurs d’hier, pommes dorées

les chevaux jouets du Népal

les photographies de mes amours, tous

qu’est-ce qui allège alors la tension des jours,

console mes nuit ?

nous, blottis comme un nouveau-né

les bras serrés, neufs

vibrants au milieu d’une bataille

maintes fois livrée

ce rituel tient à la jouissance

et le guerrier connaît sa victoire

l’a domine

car il est lui-même porter du trophée

si un mot s’échappe dans la mêlée

glisse dans ma main

( elle quémande son baiser )

seigneur, si moi la femme récompensée

dans sa nature de figue écartelée

vient à lécher tout le corps de l’homme aimé

comme une louve ferait à son petit

roulé hors de son ventre

pardonnez alors à la nature

ce qu’elle retient encore dans sa griffe

rien ne laissait prévoir que ma chute a été si fatale

devant la mer

l’océan battu

vient me voler son prénom

dans cette main droite

ouverte au moment propice à l’amour

et du vent souffle

de son haleine brûlante

je garde moi, morsures et douces empreintes

d’une bouche ornée d’une dentition irrégulière

massacrante et bénite

l’homme lâche sa semence

aussitôt me brise la nuque

un vrai guerrier

écoutez ma plainte
parole délivrée enfin de l’ancestrale peurd’être repoussée encore et encore

hors du giron du père aimé
absent, autoritaire


je vous dis que ce père
que j’ai reconnu en toute crainte

comme étant le bourreau
qui embrasse la bouche du condamné

avant de lâcher sa hache

je garde intacte la pose le cou tendu vers la lame

je deviens le cadavre offert à tous en place de grève

les fleuves coulent, lavent les pieds des pèlerins

les croyants murmurent leurs secrets en fin avoués

je lave tout à grands seaux d’eau et je frotte

je frotte jusqu’à ce que la peau imprime cette volonté

j’efface les petites morts qui ont coulé sur mes cuisses

et vous ont béni de chaudes baptêmes

de prières languissantes

l’Hermite épouse son coquillage et l’abandonne épri

de libertinages enfantins

ils sont tous comme ça, me dis-je

cette valise qui ne porte en elle que l’attente

est étrangement la même, pour nous toutes

les poitrines offertes des guerriers

ont des armures telles que seule une fine épingle glissée

entre deux lames

proches du cœur du héros

pourrait avoir foi de leurs craintes. ( ...)

LM

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