le défi.
New York n’est plus qu’un sifflement aigue
qui s’efface sur l’écran.
Ensuite la pub gratte le son, les mots sont rapides,
ils se frottent, je n’écoute plus.
Cela arrive vers mon oreille droite, l’autre reste fermée
Parfois, j’attrape le mot juste, comme ça, à la volée.
Il s’incruste sans me demander la permission,
je me laisse faire.
Glisser sur l’instant, pointer ma face de rat,
tout changer sans savoir si je vais pouvoir
finir ma phrase.
Je suis à la minute près et sur le tard, la même.
J’entends donc:
- « Pas de compassion pour le roi ! « .
Cette phrase n’a rien d’exceptionnel,
sinon qu’elle se détache de toutes celles
que j’ai pu accumuler dans ma mémoire.
Je joue d’ambiguïtés, en projetant
mes propres mots dans des lieux inconnus.
Ils me reviennent autrement enrobés
d’une aura de respect.
Une distance se crée et j’ai l’impression d’avoir
volé à autrui, un petit trésor convoité et libérateur.
Ainsi, le futur roi serait fou d’amour pour la bâtarde.
De suite, je me colle au personnage
du fils du roi du Portugal, au XIVsiècle, D. Afonso IV.
Celui qui a couronné reine, mais morte, Inez de Castro.
Moi, je prétends qu’il était trop soumis à la loi du père.
Il va malgré le danger qui guette son amante,
la garder auprès de lui.
Agissant plus en fougueux guerrier qu’en politique,
il sent monter une fièvre bonne pour l’éternité.
Alors pourquoi lui et pas moi ?
Je suis également prête à grignoter la pomme,
à transgresser, bravant tous les interdits liés à la mort.
Roulée dans une cape, une guirlande de Noël posée sur la tête,
je veux jouer aux passions interdites.
Mais revenons à D. Pedro, on pourrait dire du jeune roi
qu’il était cruel, mais il y aurait méprise.
Le mot juste est « Cru « , le justicier si l’on préfère.
Au bout de combien d’années va-t-il la déterrer ?
Quatre, sept ou dix ans ?
Six, je l’ai lu dans un roman espagnol.
Le peuple a suivi la procession macabre,
la cour a craint la folie amoureuse et coupable
de D.Pedro, tous ont prêté hommage à la morte.
Oui, c’est d’elle dont je vous parle.
J’insiste à créer autour du mythe de Castro,
une sorte de permanence liée
à l’amour absolu et néanmoins tragique,
non pas dans son historicité légendaire,
mais dans sa cruelle humanité.
L’amour de Pedro et Inez nous oblige à la pose.
Celle qui nous place entre deux tombeaux
dentelés au centre de l’attente.
Je crois que c’est justement là,
que le roi a imaginé le cœur du silence
et notre possible reddition.
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